Ils valorisent leur lait au juste prix Ils valorisent leur lait au juste prix
Grâce à la marque FaireFrance, l’élevage de Jean-Luc et Catherine Pruvot a renoué avec la rentabilité. Et ils ont découvert le plaisir de discuter avec les consommateurs.
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Parfondeval est l’un des plus beaux villages français, c’est aussi un village du nord de l’Aisne où des éleveurs ont retrouvé le sourire. Depuis que Jean-Luc et Catherine Pruvot se sont investis, avec une poignée d’autres producteurs, dans la création de la marque de lait FaireFrance, ils ont pris leur destin en main. « Comme beaucoup d’éleveurs laitiers, nous avons subi de plein fouet la crise du lait en 2009, se souvient Jean-Luc. À l’époque, nous avons fait la grève du lait. Nous nous demandions comment sortir de l’impasse. »
Cette période difficile les a rapprochés d’autres éleveurs originaires de tous les bassins laitiers français. « Puisque nous étions membres de l’Apli (1), nous avions des relations avec le syndicat européen European Milk Board (EMB) qui prône une régulation des prix, indique-t-il. Des collègues autrichiens, belges et allemands avaient créé, chacun dans leur pays, une marque de lait équitable. C’est ainsi que FaireFrance est née. »
Le « vrai » prix de revient
Aujourd’hui, le Gaec Pruvot valorise 20 % de son lait sous cette marque, à 0,45 euro le litre, soit au niveau de son vrai prix de revient. « C’est-à-dire celui qui inclut la rémunération du travail et du capital », précise l’éleveur. En 2012, lorsque le projet commence à prendre forme, c’est avec le contrôle laitier que le Gaec effectue le calcul. Avec le travail rémunéré à un Smic et demi, et le capital à 0,0267 €/kg lait, les exploitants obtiennent un prix de revient pour leur lait de 0,40 €/l, ce qui correspond à peu près à la moyenne de leurs collègues au plan national.
Il leur fallait également trouver un industriel et des acheteurs prêts à jouer le jeu. Avec quelques éleveurs, le couple a contacté l’ensemble des laiteries implantées en France, et des enseignes de la grande distribution. Si la grande distribution a répondu favorablement assez vite, seule la Laiterie de Saint-Denis-de-l’Hôtel (LSDH), dans le Loiret, a accepté de les suivre. Désormais, leur lait est livré à leur coopérative, Lact’Union à Braine. Il est payé au même prix que celui des autres adhérents de la coopérative, actuellement 0,35 €/l. Le Gaec reçoit ensuite un complément de 0,10 €/l de la marque FaireFrance pour une partie de son lait, 170 000 litres en 2018. Soit une prime de 17 000 euros. En contrepartie, les éleveurs assurent au moins deux jours d’animation par an dans un magasin. Catherine et Jean-Luc Pruvot sont éleveurs avant tout, comme leur fils Corentin qui les a rejoints en 2015 sur l’exploitation. « Je ne trouve aucun plaisir à passer une demi-journée sur un tracteur, reconnaît Jean-Luc. C’est pourquoi nous avons confié une grande partie du travail des champs à une entreprise de travaux agricoles, notamment l’épandage des fumiers, les récoltes de céréales et d’ensilage de maïs et, parfois, les semis de blé. Nous avons abandonné le colza, car il nécessite beaucoup d’applications de produits phyto et complique le désherbage des céréales. »
Simplifier la ration
Ces dernières années, les exploitants ont modifié leur façon de gérer l’élevage. « Autrefois, nous étions obsédés par le volume de production, poursuit Jean-Luc. Depuis quelques années, nous nous efforçons à mieux le valoriser. Nous cherchons aussi à être plus autonomes et à simplifier la ration. L’introduction de la luzerne dans l’assolement nous a permis de réduire de moitié nos achats de soja. »
Les vaches sont en pâture dès les premiers jours de beau temps, en général courant mars, et jusqu’au 15 octobre. L’hiver, la ration type est composée de 35 kg d’ensilage de maïs, 10 à 15 kg de luzerne, 15 kg de pulpes surpressées, 3 kg de soja et des minéraux.
« La marque FaireFrance a changé notre vie. Quel plaisir que celui de discuter avec les consommateurs, ajoute l’éleveur, qui assure la présidence de la marque depuis 2015. Je ressens aussi une certaine fierté à avoir négocié avec quelqu’un comme Michel-Edouard Leclerc, ou à accueillir France 2 sur l’exploitation. » Jean-Luc a même été reçu, avec une douzaine d’autres producteurs européens, par le pape François, à Rome, en janvier 2016.
Blandine Cailliez
(1) Association des producteurs de lait indépendants.
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